mardi 21 avril 2015

Ni technique, ni bureaucratique, mais politique !

Projet de loi sur le renseignement : la solution n'est ni technique, ni bureaucratique.

Je vais pas refaire un historique de la loi pour la surveillance généralisée : inutile et surtout, massivement répétitif, car je pense que ceux qui y accordent un peu d'importance ont bien compris, et que maintenant, ce n’est pas d’explications dont nous avons tous besoin : c’est de propositions d’actions.

Pour ma part, et je vais passer pas mal de temps à le dire et le redire, il y a deux axes de solutions auxquelles je ne crois pas - on peut en parler pendant des heures, mais un peu de réalisme vous montrera que je ne suis pas très loin de la réalité.

Fausse bonne idée #1 : la fuite en avant technique.


Elle consiste à dire : puisque le gouvernement nous espionne, alors nous allons utiliser des moyens de plus en plus complexes : chiffrement des mails, utilisation de VPN, de proxies TOR, etc.

Raison #1 : Tout le monde ne peut pas le faire.


Je suis passée par là, moi aussi, à croire qu'on pouvait rendre les choses simples. J'en suis revenue. Donc, il y a fort à parier que seule une petite partie d’entre nous y arrivera (ou croira le faire), ce qui aura plutôt pour effet de nous rendre visibles. Essayez d'envoyer des mails chiffrés à quelqu'un qui n'y comprend rien. Et je ne veux surtout pas dire que les ignorants en informatique sont des gens stupides. C'est juste qu'un savoir qu'on ne pratique pas à tendance à s'effacer.

Raison #2 : Vous pensez pouvoir, vous vous trompez.


Il y a de nombreux doutes sur la confiance que l’on peut accorder à tous les éléments de la chaîne technique : ordinateur (qui pourrait être trafiqué à notre insu, voire buggé - il existe par exemple un défaut potentiel de micro-processeur qui fragilise certains algorithmes de chiffrement.), système d’exploitation (notamment Windows), navigateur (quelle confiance accorder à Firefox, qui reste mon choix), chaîne de certification SSL (avec par exemple de la rupture protocolaire), etc. etc. Le reste de la liste que vous pouvez faire est laissé comme un exercice pour le lecteur.

Raison #3 : Vous pensez encore pouvoir ? Vous vous trompez encore.


Allez, rapide exercice : que ceux qui pensent passer 3 heures par jour à faire de la sécurité informatique pour le restant de leurs jours lèvent la main. Je vous ai menti : il faut y passer encore plus de temps. La sécurité ? Vous avez pas idée. Et encore, quand il ne s'agit que de vous protéger d'un "pirate" qui ne cherchent que les cibles les plus faciles, ça va encore. C'est même facile. Mais quand il s'agit de vous protéger d'un État aux moyens quasi-illimités ?

Et il ne s'agit pas que d'installer du logiciel. Il faut faire fonctionner les pièces ensemble. Il faut mettre à jour quand il y a des corrections importantes de sécurité. Il ne faut pas commettre d'erreur (or, vous le savez, l'erreur est humaine...). Il faut mettre à jour les certificats. Et encore, j'effleure juste la surface.

Raison #4 : Toute fuite... justifiera une poursuite !


Rêvons deux secondes. Si TOR, par exemple, se généralise : il pourra être déclaré illégal. Il pourra être attaqué via différents moyens. Un ministre de l'intérieur passera à la télé pour dire que c'est un refuge de pédo-terroristes (dans des termes mieux choisis, hélas). Vous voyez l'idée ?

Raison #5 : Ce n'est pas une vie.


Nous ne sommes pas des rats pour vivre cachés dans des souterrains. Nous sommes des humains, nous voulons vivre debout. Notre vie privée nous est plus ou moins précieuse (cela dépend des gens et des aspects de cette vie privée), et nous la protégeons en accord avec nos principes, et cela inclut, je pense, de pouvoir parler librement, sans trop se soucier des conséquences. À partir du moment où votre parole n'est plus déchiffrable que par quelques privilégiés... vous vous êtes enfermé tout seul.

La fausse bonne idée #2 : La lutte via les institutions "démocratiques".


Je m'attaque ici à un hochet auquel les français (pour ne parler que d'eux) restent encore attachés : la fameuse république pseudo démocratique et sa bureaucratie. Je veux en finir avec les appels grandiloquents "à messieurs les députés", "à voter rouge/vert/bleu ou jaune", aux citations (certaines périmées, d'autres imaginaires) des "lumières", bref, à l'attirail prêt-à-penser issu du catéchisme républicain.

Raison #1 : PERSONNE AU POUVOIR NE VOUS AIDERA !


Si vous ne faites pas partie de la poignée de privilégiés invitée à parader sur les plateaux télé, des "people" dont l'avis compte : personne ne tiendra compte de votre avis.

C'est triste, mais c'est comme ça : regardez l'histoire récente; et j'ai discuté personnellement (ce qui n'a pas une grande valeur en terme de statistiques) avec pas mal de gens qui pensent que les choses ne vont pas si mal quand on les confie à une sorte de leader charismatique. Les gens n'ont pas vraiment, dans l'abstrait, je veux dire, un attachement farouche à la démocratie. C'est sans doute une des raisons (mais il y en a d'autres) pour laquelle les députés sont des autoritaires qui prennent des décisions pour les autres sans aucune intention d'en rendre jamais compte à qui que ce soit.

Raison #2 : Les élections sont non seulement une farce, mais elles ont lieu tous les 5 ans.


Autant dire, vous pouvez préparer votre vengeance... la plupart des gens dans le pays auront tout oublié dans 2 mois.

Raison #3 : Voter n'est pas de la politique ! C'est de la sous-traitance.


Je sais c'est dur, mais je vous dois la vérité : arrêtez de vous plaindre parce que vos sous-traitants font n'importe quoi. Il n'y a pas vraiment le choix : Reprenez le contrôle ou soyez des esclaves.

Raison #4 : Le système n'est pas dirigé par les politiques, ou si peu : c'est la bureaucratie qui décide, ensuite ce sont les lobbies - et pour finir, le hasard.


Lorsqu'on vous refuse un droit, croyez-vous que c'est le politique qui décide ? Non. Une bureaucratie, quelle qu'elle soit, peut décider de faire, ou ne pas faire. Vous pouvez vous battre. Elle a tout son temps. Vous pouvez même gagner. Elle en aura d'autres. Et ses directeurs sont inamovibles. Ils valsent au gré des saisons, de placards de luxe en places au soleil.

Ces « clous » qui fixent les limites et les conditions de la lutte, sont issus de plusieurs siècles de mise au point (qui n’est pas forcément coordonnée) pour rendre toute tentative de changement vaine. Non, supplier et ramper devant votre député ne changera rien. Ce n’est pas à vous qu’il doit son élection, mais à son parti. On va pas en discuter pendant des heures.

Mais alors comment faire ?


La solution est simple, mais c'est sa mise en œuvre qui est compliquée : reprendre le pouvoir. Et ça commence par un truc pas agréable : se bouger soi-même, donner l'exemple pour faire bouger les autres.

On rêve tous d'une solution qui serait indolore, rapide, efficace. Ah, faire la révolution en cliquant ! Ou en adhérant au parti A ou B, à l'association C, en signant une pétition.

Mais non, ça ne se passe pas comme ça.

Je n'ai pas de solution toute faite, de plan génial : ma modeste contribution sera celle-ci : rassemblons-nous de proche en proche, organisons des débats publics, faisons sortir les gens, faisons passer le message par ceux qui ont de l’audience, mais aussi par la masse de tous les gens de bonne volonté;

Le projet de loi sur le renseignement est une chose : mais il y a bien d'autres sujets !

Cela va créer des liens - et pas des "hyperliens" - on va (re-)découvrir qu'on est pas entouré d'ennemis, mais de gens de bonne volonté. On va commencer à construire des choses. Utilisons les techniques de communication, non pour faire, mais pour communiquer sur ce que nous faisons en "vrai".

Et alors nous pourrons espérer convenir, en ces lieux, localement, et en commun, comment défaire le pouvoir, détruire la légitimité de l’appareil bureaucratique et pseudo-démocratique, et construire autre chose à la place.

Nous pouvons le faire ! Ça ne tient qu’à nous !

Ceci n'est que ma suggestion :  j'espère en entendre d'autres et je les relaierai avec plaisir si elles évitent les deux écueils dont je viens de parler. Je reviendrai d'ici quelques jours avec un petit guide qui pourrait vous aider à commencer ou simplement vous inspirer.

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